Elle danse depuis quarante ans et a fondé avec son mari Julien Derouault l’école du Théâtre du corps, qui est aussi le nom de leur compagnie. À la maison ou dans leur atelier d’Alfortville, c’est elle qui veille à la décoration à la fois baroque et épurée.
Propos recueillis par Laurent Marcelier Portrait © Pascal Elliott
Quel est le style de votre intérieur ?
Notre maison date de 1890, elle a des moulures, des vitraux, des radiateurs en fonte. J’aime bien l’ancien rénové de manière contemporaine, et l’association de meubles et d’objets venant d’univers variés. Sur une petite commode en pin, j’ai placé des vases en forme de masques grecs découverts chez un artisan – j’apprécie beaucoup les pièces uniques. Près d’un tableau contemporain, on trouve une estampe japonaise. Le trait d’union entre chaque lieu reste l’épure. La décoration est sur les murs. Chaque pièce invite à une atmosphère différente, par exemple la chambre à coucher est dans les bordeaux et les blancs. Quant aux murs du salon, ils arborent des tons très affirmés, bleu turquoise, vers anis, gris anthracite.
Qu’avez-vous rapporté de vos voyages ?
Je me produis souvent en Asie, et je rapporte à chaque fois des boîtes en bois de toutes les couleurs, des jeux de dés, des poupées chinoises pour ma maman qui en fait la collection. Des meubles aussi, comme un banc thaïlandais sculpté. Au Maroc, j’ai déniché un énorme vaisselier orné d’argent, des lampes typiques, un très grand miroir avec des portes qui dévoilent un autre miroir.
Le meuble, l’objet, qui vous suit depuis toujours ?
C’est une petite table en bois toute simple qui s’est un peu abîmée au fil des déménagements et qu’un de mes amis a transformée, lui donnant une deuxième vie. Ensuite, il y a la caméra 16 mm de mon père, il l’avait toujours à la main. Je peux mettre beaucoup d’énergie à redécorer une maison, puis décider de tout changer et me débarrasser de meubles. Je ne suis attachée qu’aux livres et aux photographies.
Comment avez-vous décoré l’atelier du Théâtre du corps ?
Le lieu est atypique, car il est situé dans une ancienne fabrique, il est rempli de souvenirs . Il contient les costumes, les accessoires et les affiches de mes spectacles. À côté des studios « standards » – plancher de danse, barre, miroir – se trouve l’endroit détente avec deux statues « rhinhommes », moitié rhinocéros, moitié homme, conçues par Gaël Perrin, qui est scénographe. Elles étaient exposées dans le hall du Grand Rex pour le spectacle M. & et Mme Rêve. J’y ai aussi rapporté des canapés de chez moi. Je garde tous mes décors, dans un autre entrepôt. Cela m’arrive d’acheter des tables, des fauteuils ou des accessoires et de les transformer pour la scène. J’ai ainsi customisé une méridienne pour Lorenzaccio. En revanche, chez moi, rien ne se rapporte à la danse, pas même une photo. Je dissocie vraiment le privé et la compagnie.
Pièce fétiche : « la cuisine, c’est mon espace de création »
« L’endroit où je me sens le mieux reste la cuisine, ce qui est un non-sens, car je ne cuisine pas. Avec mon mari, on y évoque nos créations, nos idées, nos réflexions. J’ai voulu des meubles sans poignées, un comptoir en Corian®, des sièges tabourets italien, une table tulipe où je reçois mes amis à dîner. Autant j’ai osé les couleurs partout ailleurs dans l’appartement, autant la cuisine est tout en noir et blanc. C’est un endroit sobre, pur, neutre, reposant et très inspirant. »
Article paru dans le numéro 162 de Résidences Décoration.