À moteur ou à voiles, les yachts imaginés par le Studio Liaigre
naissent des envies de leurs commanditaires. Sur mesure, exclusifs,
ils reflètent leur sensibilité et leur soif d’horizons nouveaux.
Texte Anne-Marie Cattelain-Le Dû / Photos Mark Seelen
Le SL44, qui a décroché l’Award Design des plus de 40 mètres à Venise lors de l’International Yacht & Aviation Awards 2022, a été imaginé comme un appartement flottant métissant harmonieusement styles asiatique et français. Chacun de ses espaces offre des échappées et des perspectives étonnantes et différentes sur l’environnement. C’est l’une de ses principales caractéristiques, rare sur un bateau de cette dimension – 44,5 mètres de long –, véritable gageure que le constructeur et le designer ont relevé avec brio pour combler les vœux du client, un esthète épicurien.
Quel que soit le type d’embarcation, voilier animé par le vent ou yacht propulsé au moteur, le Studio Liaigre veille à ce que tous ses projets répondent parfaitement aux envies des propriétaires, à leur mode de vie, leurs habitudes, leurs terres océanes de prédilection et d’évasion. « Les bateaux sont les derniers sanctuaires de liberté, très personnels, intimistes », explique Guillaume Rolland, directeur du département yacht design chez Studio Liaigre. Amoureux de la mer, expert en navigation, il saisit vite les désirs de ses clients et leur faisabilité en fonction des contraintes spécifiques du milieu marin. « Naviguer aide, en renouant avec les éléments, à s’affranchir du quotidien, de la routine, mais cela peut aussi déstabiliser. Admirer la mer, scruter l’horizon, rien de plus essentiel, de plus absolu dans le monde actuel souvent stressant et oppressant, à condition de se sentir en sécurité, en osmose avec cet univers particulier. Lever l’ancre, larguer les amarres, cela sonne à chaque fois comme un nouveau départ, un pari, une aventure, même sur un yacht de grand luxe. »
Pour que ces croisières, quels que soient leur but ou leur durée, soient agréables à vivre, tout est question de fluidité. Dès la conception, cette notion essentielle guide la réflexion des différents intervenants, de l’architecte chargé des infrastructures à l’architecte d’intérieur. Les aménagements du SL44, très étudiés par les équipes du Studio Liaigre, expriment cette aisance, cette facilité de mouvement. Les cabines dessinées tout en courbes, sans aucun angle vif, enveloppent comme un nid.
Ce design rassurant apporte un sentiment de bien-être, de réconfort immédiat. Se déplacer sur un bateau, soumis aux courants, aux vagues, aux vents, à des mouvements plus ou moins denses, peut se révéler déroutant, voire périlleux. On ne bouge pas de la même façon à bord d’un navire que sur la terre ferme. Le corps est parfois déséquilibré, projeté contre des parois, les pieds se dérobent, d’où cette nécessité « d’arrondir les angles » pour faciliter non seulement la marche mais chaque instant de la vie à bord, et préserver les moments de convivialité, de partage comme les repas, par exemple, mais aussi le repos et le lâcher-prise. Voyager à bord d’un yacht, c’est avant tout y vivre, parfois 24 heures sur 24 et plusieurs jours d’affilée, sans relâcher nécessairement dans un port. C’est pourquoi, à chaque étape de l’aménagement, le studio se soucie des hommes qui habitent ses embarcations.
Ses architectes et designers s’interrogent sur le déplacement, sur la circulation à la fois de l’équipage et des passagers. Ensuite, ils cherchent à optimiser chaque centimètre carré, à établir un dialogue naturel entre indoor et outdoor. L’aménagement du SL44 obéit à ce principe d’une architecture à la fois structurée et ouverte. Pour preuve, la cabine du propriétaire, déployant ses 147 m2 sur trois niveaux mêlant espaces intérieurs et extérieurs liés par des jeux de transparence. Les murs et les cloisons ajourés, façon panneaux flottants, les couleurs choisies – blanc, écru, vert, rouge grenat, bleu de Prusse – et les matériaux – bois foncés et clairs, pierres semi-précieuses, cuir – signent un design subtil, chaleureux, léger, capable de braver les tempêtes… pour arriver à bon port sans cœur chaviré.
Reportage paru dans le numéro 165 de Résidences Décoration.