Sous l’impulsion des propriétaires fans d’Italie, la décoratrice Nurit Geffen a paré de design milanais un espace de 145 m2 situé près de la mer dans le quartier de Herziliya.
Texte Anne Marie Cattelain-Le Dû / Photos Oded Smadar / Droits réservés
Rêver l’Italie… L’inviter chez soi dans toutes les pièces, telle était l’envie d’un couple dont le mari avait étudié la médecine dans ce pays où de nombreux voyages d’agrément les avaient menés par la suite. « Cette idée m’enchantait, confie l’architecte. Pendant quatre ans, j’ai donc accompagné avec enthousiasme mes clients, des gens formidables, très gais, chaleureux. » Avec eux, Nurit Geffen visite le bien, avant l’achat, puis élabore point par point la conception, la faisabilité, la restructuration, la restauration, repérant et établissant la liste de tous les fournisseurs possibles.
« Quatre années se sont écoulées entre l’acquisition de l’appartement et la fin du chantier. Avec la pandémie en invitée surprise », raconte-t-elle. Tout provenant de la botte, une course-poursuite s’est engagée pour terminer dans les temps le chantier, soit avant septembre 2020.
« Heureusement, début janvier 2020, juste avant le confinement, nous nous sommes rendus tous ensemble à Milan pour sélectionner la quasi-totalité des articles. Nous avons visité les meilleurs studios de design et showrooms alors que le monde bruissait de nouvelles alarmantes en provenance de Chine », se remémore la décoratrice. Quelques jours après le retour du trio à Tel Aviv, en février, le monde entre peu à peu en confinement et le rêve italien s’assombrit. Par chance, en Italie, durement éprouvée, les ateliers d’ameublement, considérés comme industrie essentielle, continuent de produire, et malgré les transports devenus aléatoires, les éléments arrivent à bon port. En Israël, il en est de même pour la construction et la rénovation, autorisant à poursuivre les travaux. Le chantier s’emballe, avec frénésie.
Très vite, l’Italie colonise ce penthouse en devenir à Herziliya, quartier universitaire de Tel Aviv. Les carreaux de sol, les marbres, les revêtements muraux, les sanitaires, le mobilier tels les armoires de cuisine, mais aussi les éléments de salles de bains, jusqu’aux porte-serviettes fabriqués en Italie, sélectionnés avec méticulosité, sont réceptionnés puis mis en scène par une équipe ultra-motivée œuvrant dans l’urgence.
« Je veillais à ce que l’élégance, le confort, la convivialité, base de mon concept, prennent forme et que la passion italienne des propriétaires transpire à travers les marbres, dont celui veiné de couleur orageuse du comptoir de la cuisine, les peintures laquées du living aux teintes allant du cappuccino délicat, vaporeux, au brun foncé presque noir du petit espresso serré qu’on savoure après le déjeuner, en passant par les canapés crémeux et les fauteuils chocolat. »
Puis, parce que l’Italie est le pays de la lumière, le trio, clients et architecte, multiplie l’usage du verre, parois, plan de travail, et les points lumineux, optant pour des pièces uniques allant du transparent à l’opaque.
Avec, marquant la frontière entre le salon et le grand balcon de 45 m2, la lampe « Elementi » de De Padova conçue par la designer italienne Elisa Ossino. Alliance de quatre boules en verre blanc très fin, suspendues au plafond par un fil mince en métal noir et frôlant une table basse. « Dès le début du projet, j’avais en tête cette lampe, dont j’avais vu un prototype deux ans auparavant. Mes clients l’ont aussi adorée. C’est un des éléments clés, un point central, comme une marque de ralliement que l’on admire tout autant de l’intérieur que de l’extérieur, une sorte de phare qui, de loin, signale la maison. »
En juillet, sous un soleil de plomb, le penthouse commence à ressembler à un lieu d’habitation. Pour apporter de la gaieté et adoucir les marbres, de nombreux tapis agrémentent désormais les sols, tandis que des œuvres d’art chinées dans les galeries milanaises et à Tel Aviv sont accrochées dans les différents espaces.
Récompense suprême, une fois les derniers détails réglés, trinquer sur la terrasse et admirer à perte de vue les champs s’étalant au nord et la Méditerranée à l’ouest, en se congratulant les uns et les autres d’avoir, envers et contre cet affreux virus, donné forme aux rêves italiens, tout en émettant des vœux pour que les populations lourdement atteintes sortent du marasme.
Reportage paru dans le numéro 160 de Résidences Décoration