À 91 ans, le petit homme en bleu, l’œil vif, l’allure tonique, continue, avec ses filles Adeline et Eléonore, et le chef Hugo Souchet, à régner sur Les Prés d’Eugénie. Et à éblouir chaque convive.
Texte Anne-Marie Cattelain-Le Dû
Un demi-siècle d’excellence, d’inventivité, d’audace. Audace de quitter Paris qui l’encensait pour rejoindre Christine Barthélémy à Eugénie-les-Bains, dans les Landes, l’une des stations thermales de La Chaîne du soleil, créée par son père. Lieu sans charme, sans grâce. Mais Christine et Michel décident, à l’unisson, il y a cinquante ans, d’enchanter le vaste domaine, elle côté décoration et jardin, lui « aux fourneaux », prônant la “nouvelle cuisine” puis la “grande cuisine minceur”, conciliant gastronomie et forme. Un électrochoc pour les épicuriens qui débarquent alors du monde entier pour se régaler en gardant la ligne. Son épouse disparue, Michel Guérard poursuit l’aventure avec ses filles, au cœur du Relais & Châteaux cinq étoiles, labellisé palace en 2017, récompensé depuis 1977 de trois étoiles Michelin. Répétant à l’envi : « Le destin m’a gâté. Je lui ai sans doute facilité la tâche en bousculant avec Senderens, Chapel et les Troisgros la cuisine de papa, dite “grande cuisine”. »
Ma Cuisine, mon concept
« Dans les années soixante, nous étions quelques-uns à prendre une certaine liberté par rapport à la cuisine classique, statique. Notre jeunesse s’arrangeait de notre impertinence, de ce pied de nez aux “anciens” qui, comme pour le nouveau roman ou le nouveau cinéma, faisait parler de nous, même si ce n’était pas l’essentiel. » Lucide et taquin à la fois, le chef rappelle son propos : allier le bon et le beau, surprendre, régaler, par une cuisine qu’il qualifie de naturaliste exaltant les saveurs. Comme l’œuf de poule au caviar osciètre où le dim sum diaphane aux champignons, infusion crémée de truffe et mousse de chêne. Des plats malicieux qui titillent les papilles conçus par ce gamin de 91 ans qui prend toujours le temps d’échanger avec ses convives et avec ses équipes. Et qui, loin de se contenter des acquis, continue à inventer, à chercher, en harmonie parfaite avec Adeline, Eléonore, et Hugo, ses « héritiers ».
Ma recette : soupe froide de fraises et tomates
Pour 4 personnes
400 g de fraises fraîches // 7 tomates mûres // 3 cuil. à soupe et demie de vinaigre de Xérès // 2 cuil. à soupe et demie d’huile d’olive // Sel, poivre
Pour le décor
3 fraises et 1 petite tomate taillées en dés. Pluches de cerfeuil.
Préparation
Equeutez les fraises, rincez-les sous un filet d’eau fraîche. Émondez les tomates en les plongeant quelques secondes dans l’eau bouillante. Coupez-les en deux. Mixez à grande vitesse tomates et fraises assaisonnées de sel et poivre pour obtenir un velouté homogène. Ajoutez vinaigre et huile. Passez au chinois. Réservez au frais. Pour servir, parsemez dans chaque assiette des dés de fraises et tomates. Ajoutez un filet d’huile, décorez avec quelques pluches.
Mon chemin de table
Le coquetier, classique
Harmonie en noir et blanc pour qu’un simple œuf à coque devienne œuvre d’art et reste chaud. En porcelaine soulignée d’un trait, passe au lave-vaisselle et au micro-ondes.
Les 6, 31 €, « Phönix » de Van Well.
L’alcool vintage, note unique
Vermouth français, pour déglacer, apporter une touche de complexité, de finesse avec ses 20 herbes et épices dont la camomille, la coriandre du Maroc, les oranges amères de Tunisie. À partir de 18 €, Noilly Prat Original Dry.
Poêle en fer, l’incontournable
Pour saisir viandes et légumes grâce à sa capacité à atteindre de hautes températures et à les maintenir de manière uniforme pour une cuisson parfaite. Poêle en fer noir, 240 mm de diamètre, 64,79 €, De Buyer.
Poudre de Perlimpinpin, secrète
Cachée dans son joli pot pour garder son mystère, énigmatique, espiègle, intrigante… à l’image de la cuisine que Michel crée avec Hugo. En métal pour conserver les épices et saupoudrer une pincée. 4,25 €.
Article paru dans le numéro 177 de Résidences Décoration.