Cette artiste française très connue, qui vit entre Los Angeles, sa résidence principale, et Paris, son pied-à- terre, aime poser les armes et les masques dans cet appartement à son image, « miroir de son âme », assure Oscar Lucien Ono, le décorateur.
Texte Anne-Marie Cattelain-Le Dû / Photos Francis Amiand
Cet appartement, imaginé comme un cabinet de curiosités, est un refuge entre deux tournées, entre deux concerts, un pied-à-terre pour une artiste française quadragénaire qui vit depuis de nombreuses années à Los Angeles mais aime se poser à Paris ou filer en Normandie, respirer un grand bol d’air iodé avant de repartir en tournée autour de la planète. « C’est par l’entremise d’amis communs que j’ai rencontré cette artiste de renom qui venait d’acheter un cinq-pièces très ensoleillé, légèrement en retrait de l’avenue Foch, au troisième étage d’un imposant immeuble en pierres de taille datant de la seconde moitié du xixe siècle », raconte Oscar Lucien Ono. Elle cherchait un décorateur atypique, amoureux des belles choses, créateur d’ambiances décalées. Son idée maîtresse était de donner à ces 150 m2 typiquement haussmanniens une allure théâtrale, un brin rock’n’roll, de casser ses codes bourgeois, trop raides, en ne gardant qu’un seul élément fort : le parquet patiné en point de Hongrie. Une feuille de route comme Oscar Lucien Ono les aime, lui laissant une réelle liberté, permettant de mélanger les genres et les styles.
Au départ, il avoue avoir été surpris que ce bien ait séduit d’emblée sa cliente. Il semblait peu en adéquation avec son mode de vie, son caractère et même son look hyper fun. Il l’imaginait davantage Rive gauche, du côté de Saint-Germain-des-Prés, perchée à Montmartre, voire ancrée du côté de la Bastille ou au bord du canal Saint-Martin. « Je l’ai longuement interrogée pour comprendre ses motivations d’achat et son engouement, cela m’a orienté pour bâtir mon projet. Elle m’a expliqué que c’était en quelque sorte le négatif de sa maison à Los Angeles. Elle appréciait ce coin du 16e, tranquille, verdoyant, où elle risquait moins d’être reconnue, harcelée. Elle appréhendait ce nouveau domicile comme une respiration dans sa vie trépidante, ajoutant qu’elle souhaitait l’habiller de fantaisie, mélanger les genres et réorganiser les pièces afin de rendre son home parisien très rationnel, facile à se réapproprier à chacun de ses séjours. » En menant plus avant la discussion, le décorateur a noté l’intérêt de son interlocutrice pour les belles matières, les œuvres d’art, et son envie d’habiter un « univers » hors du commun avec son mari et ses enfants de 14 et 8 ans. Il a donc privilégié le sur-mesure, l’artisanal, l’exclusif, et mis à contribution ses collaborateurs pour dessiner la plupart du mobilier. Il a opté pour les matériaux les plus nobles, ceux que le temps embellit : le marbre, le granit, le bronze, les essences de bois aux teintes et reflets remarquables comme le macassar et l’ébène. « J’ai chiné aux puces, chez les antiquaires, pour dégotter de jolies pièces, des fauteuils, des poufs, des consoles. J’ai réuni des artistes décorateurs de qualité comme la designer Florence Girette, qui enchante aussi bien les murs, les plafonds, les sols que les objets. J’ai parcouru les galeries pour enrichir sa collection personnelle de sculptures et de peintures. Et j’ai abordé ce chantier avec passion, en toute connivence et confiance, trois éléments essentiels. »
Une des premières démarches du décorateur a été de noter tous les points positifs de la nouvelle acquisition : son excellente isolation phonique ; son orientation offrant beaucoup d’ensoleillement et de luminosité quasiment tout au long de la journée ; la possibilité d’abattre des murs non porteurs pour créer une grande pièce à vivre composée d’un salon, d’une salle à manger et d’une cuisine. « Un appartement sain, avec un joli parquet, de belles proportions. Un lieu à réenchanter, à personnaliser, à rendre unique avec, comme dans un opéra, des graves et des aigus, des allegros, des crescendos, des points d’orgue et des diminuendos pour rythmer les moments de la journée, de la nuit, dramatiser les lieux, les scènes de la vie quotidienne d’une famille qui, les portes closes, interprète des quatuors aux partitions intimistes, loin des sunlights, loin des fans et des applaudissements. »
Oscar Lucien Ono
Dandy assumé, architecte-décorateur, diplômé en histoire de l’art et archéologie (spécialité art antique), Oscar s’oriente vite vers l’architecture d’intérieur. À 38 ans, en 2014, il ouvre son studio, Maison Numéro 20. Un lieu magique rue Jacob, au cœur de Saint-Germain-des-Prés et du bois Visconti, espace vert arboré charmant de 2 000 m2 invisible de la rue. Douze collaborateurs travaillent à ses côtés sur des projets résidentiels en France, à Paris, à Saint-Barth mais aussi à l’étranger, et sur une vingtaine d’hôtels dont le Grand Magic Hotel, jouxtant Disneyland Paris, premier établissement immersif en Europe, réalisé avec l’entité canadienne Moment Factory.
Article paru dans le numéro 167 de Résidences Décoration.