Destination Saintes-Maries-de-la-Mer 

Âme de la Camargue, Les Saintes-Maries-de- la-Mer, village sacré des gitans, servent de phare, tant aux hommes qu’aux bêtes. L’eau, entre la Méditerranée et les roubines, dame le pion à la terre délavée. Une aquarelle habitée !

Par Anne-Marie Cattelain-Le Dû / Photo à la une G. Lefrancq

Quittant Arles, son agitation, ses embouteillages, ses remparts, sa tour de la fondation Luma voulue par la collectionneuse et mécène suisse Maja Hoffmann, on emprunte la route rectiligne, plate, longeant les rizières, les champs de tournesols en fleur et les vignes récemment plantées. On bascule lentement dans un autre univers, celui de Crin-Blanc et du Peuple migrateur. Comme dans un travelling, entre chevaux efflanqués à la crinière folle s’épuisant dans les prés et flamants roses volant en escadrille dans le ciel bleu dur. La Camargue des gardians et des gitans s’étale à perte de vue.

Se reflétant dans une roubine, une des cabanes-suites des Bains gardians, semblable à celles des éleveurs du XVIIIe siècle. © Matthieu Salvaing
Incontournable Notre-Dame-de-la-Mer, église-forteresse datant du IXe siècle abritant dans sa crypte la statue de Sara, la vierge noire des gitans. © J. Aubert
Dans les cabanes des Bains Gardians, le studio Hauvette & Madani s’est emparé de quelques symboles locaux, comme les couvertures à carreaux des gardians. © Matthieu Salvaing

C’est ici que Jean-Pierre Marois, ancien producteur de cinéma, séduit par cette terre abrupte, terre de traditions, de fêtes, de coutumes, vient d’ouvrir les Bains Gardians, benjamin « avé l’accent », des Bains Paris, longtemps théâtre de soirées débridées, désormais élégant cinq-étoiles au décor signé Tristan Auer. En 18 mois, accompagné par le jeune et talentueux couple du studio d’architecture d’intérieur Hauvette & Madani et de Julie Barrau, curatrice, antiquaire, Arlésienne, Jean-Pierre Marois a réuni deux hôtels qui affichaient grise mine pour composer son domaine à l’orée du parc naturel régional de Camargue. Quatre hectares quadrillés par les roubines, adoucis par des brassées de plantes autochtones, refuge de milliers d’oiseaux, où 47 cabanes de gardians coiffées de chaume et un mas accueillant 19 chambres invitent à partir en randonnée équestre ou en calèche s’imprégner de la région, et au retour à savourer au Pont des Bannes, table courue, ressuscitée, au sein des Bains Gardians, la cuisine 100 % maison, elle aussi au goût de la Camargue et de la Méditerranée. Un point de chute pour participer aux nombreuses fêtes qui scandent depuis des lustres la vie des Camarguais, avec en point d’orgue, même si d’aucuns regrettent qu’il ait perdu en authenticité, le pèlerinage des gitans honorant Sara la Noire, servante sainte dont la statue vêtue de robes multicolores et parée de bijoux trône au fond de la crypte dans l’église des Saintes-Maries-de-la-Mer. La petite ville d’un peu plus de 2 000 habitants, les pieds dans la mer et les roubines, est l’une des plus festives de cette côte. Fin août, début septembre, en l’honneur de la saladelle, plante gavée de sel et de soleil récoltée uniquement ici, se succèdent défilé à l’ancienne, abrivado, lâcher de taureaux entourés de cavaliers, cueillette et repas en plein air. Fin septembre, le cheval est roi avec foire aux chevaux, défilé de cavaliers, vide-selleries, sorte de vide-greniers ne proposant que du matériel d’équitation. Enfin, pour clôturer la saison, fin octobre, un pèlerinage religieux est dédié aux trois Vierge Marie ayant, selon la légende, débarqué ici. Comme au Moyen Âge, les gitans marchent vers l’église en chantant, cierges allumés, portant Sara, leur patronne, avant qu’elle ne regagne sa crypte.

Article paru dans le numéro 177 de Résidences Décoration.

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