Maître du design et de l’architecture, Gio Ponti a livré l’un de ses chefs-d’œuvre sur la côte amalfitaine. Un cadre de rêve pour un hôtel vintage et pourtant parfaitement contemporain.
Texte Marie Godfrain
Après avoir invité Gio Ponti à aménager le Royal Continental Hotel de Naples, son propriétaire, Roberto Fernandes, l’engage à nouveau en 1960 pour le nouvel établissement qu’il construit à Sorrente, près de Naples : le Parco dei Principi. Une commande qui permet à ce maître du design et de l’architecture italienne du XXe siècle de renouer avec ses recherches des années 1930 sur le patrimoine méditerranéen et de mettre en œuvre sa conception de l’hôtel comme œuvre d’art totale.
Et le cadre s’y prête, car ce chef-d’œuvre d’architecture moderniste s’intègre harmonieusement dans son environnement naturel exceptionnel. Le bleu en contrebas et, à l’arrière, un parc luxuriant aussi impressionnant que par le passé : une véritable oasis, un jardin botanique de 27 000 m2 abritant un petit temple néoclassique – le Temple de Vénus –, mais aussi des cascades et des terrasses panoramiques.
Car l’immense avantage du Parco dei Principi, c’est sa vue spectaculaire. Situé au sommet d’une falaise, l’hôtel offre une vue imprenable sur le golfe de Naples et le Vésuve. Gio Ponti racontait ainsi : « Un architecte nous y a conduit un jour où tout était bleu, à cause du brouillard de chaleur solaire : ciel bleu, mer bleue, profils bleus lointains à l’horizon, de Capri, d’Ischia, de Procida – îles bleues –, Posillipo – péninsule bleue – et, sur terre, le Vésuve – volcan bleu. »
Parfaitement intégré à la topographie locale, l’établissement s’inscrit harmonieusement dans le paysage environnant. Inauguré le 11 avril 1962, il surplombe la Méditerranée à 70 mètres de hauteur. Descendre vers la mer se mue en véritable expérience. Après un tunnel creusé dans des cavités naturelles, les visiteurs débouchent sur un îlot rocheux, comme une langue sur la mer où sont alignées des chaises longues.
Aujourd’hui, le Parco dei Principi appartient au groupe hôtelier « Royal Group », et il est à la fois un musée du design et un musée hôtelier. On peut ainsi y tomber sur des documents, des dessins, des meubles originaux, des photographies et des lettres signées par Gio Ponti pour s’immerger en profondeur dans un espace qui écrit encore son histoire.« Fasciné par l’omniprésence du bleu sur la côte amalfitaine, Ponti opte pour une solution chromatique immersive en bleu et blanc, de manière à pouvoir inviter l’extérieur à l’intérieur, qu’il va imprimer sur tout le projet. Une œuvre d’art entre galets et majolique, faïences que Ponti va non seulement concevoir, mais à la production desquelles il va aussi contribuer. Il élabore, avec la complicité de la fabrique Ceramica D’Agostino de Salerne, 30 carreaux de 20 cm de côté ornés de motifs qui, assemblés et orientés de différentes manières, permettent d’obtenir une centaine de sols originaux, un nombre suffisant pour rendre chaque chambre unique », explique Sophie Bouilhet-Dumas, spécialiste de Ponti, dans la catalogue de l’exposition qui lui a été consacrée au Musée des arts décoratifs à Paris en 2018 et dont l’une des salles était dédiée à cet hôtel. Pour le Parco dei Principi, il réalise 33 motifs végétaux et géométriques bleus, noirs et blancs qui font écho aux nuances du ciel et de la mer de Sorrento, omniprésents sur les sols de l’établissement, qu’il s’agisse du lobby ou des 90 chambres et qui rehaussent le bleu de la mer tout en lui offrant un contrepoint unique. Ainsi, les chambres Junior Suite et Deluxe, Superior et Family sont toutes habitées par une extraordinaire alternance blanc-bleu.
De l’extérieur, cet hôtel d’une blancheur éclatante se fait pourtant discret et on a du mal à imaginer la fantaisie rationnelle qu’il abrite tant Ponti a privilégié les intérieurs par rapport à la forme du bâtiment.
S’offrir les carrelages de Ponti
C’est aujourd’hui la maison Francesco De Maio qui produit les carrelages « Blu Ponti ». L’entreprise, située dans le village de Nocera Superiore, à quelques kilomètres de Sorrente, continue de faire décorer la collection à la main, pièce par pièce, par des maîtres artisans. La seule chose qui a changé, c’est la faïence blanche et bleue qui a été remplacée par du grès Maiolicato, adapté aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur et décliné également en version antidérapante, idéale pour les bords et fonds de piscines.
« Blu Ponti », par Francesco De Maio chez Carrément Victoire Paris.
Article paru dans le numéro 175 de Résidences Décoration.