Une villa très privée à Porto, côté Atlantique

Dans le quartier ouest résidentiel, à quelques minutes de la mer, la maison années 1960 décorée par Artur et Jacques d’Oitoemponto révèle mille et une surprises.

Texte Anne-Marie Cattelain-Le Dû / Photos Stephan Julliard

« Voyageant en permanence dans le monde entier pour suivre nos projets, nos chantiers, en dehors de nos pied-à-terre dans les villes où nous sommes le plus souvent, comme Paris, nous voulions une maison à Porto, ville d’origine d’Artur, explique Jacques, une maison près de la mer. Comme une résidence de vacances où nous puissions vivre vraiment, décompresser, recevoir mais aussi disposer les œuvres d’art, de design, qui nous tenaient particulièrement à cœur. »

Au hasard de leur balade, ils repèrent une villa années 1960, style pavillon. Elle se situe dans un quartier agréable, proche de l’océan Atlantique, de ses plages et de ses restaurants sympa, des guinguettes mais aussi d’une de leurs tables préférées, le Casa de chà da Boa Nova, deux étoiles Michelin. Bref, la villa de 400 m2, avec son jardin planté de 1 200 m2, leur tape dans l’œil.

« Sa situation, sa verdure, son côté secret, tranquille et l’océan, nous ont décidés à l’acheter pour lui donner une nouvelle vie, une nouvelle allure, plus contemporaine, tout en respectant son histoire », confie Artur.

Plan en poche, ils cogitent. Ce n’est pas rien d’imaginer sa propre maison, de la décorer, quand on construit et décore celles des autres. Un sacré stress, une aventure, un aboutissement. « Nous devions projeter, transformer une villa familiale, où vivait une ribambelle d’enfants, d’où les huit petites pièces, en une demeure avec un double salon, une salle à manger, deux suites généreuses, une pour nous et une pour nos proches de passage, deux grands dressings, car nous aimons tous les deux la mode. Nous tenions aussi à une salle de fitness pour, gourmands, tenir à distance les kilos… Mais également, ce qui n’est pas contradictoire, une grande cuisine car nous prenons plaisir à recevoir, cuisiner nous-mêmes lorsque nous sommes seuls ou en petit comité, et faciliter la tâche, lorsque nous avons une dizaine d’invités, à des professionnels qui viennent tout préparer à domicile. Et puis, indispensable, tout en respectant la végétation, nous voulions creuser une piscine avec un grand auvent. » Artur et Jacques prennent aussi conseil auprès des entreprises du bâtiment et autres professionnels. Régulièrement, pour débusquer des pièces inspirantes, ils se rendent dans leur grand entrepôt à Porto, où ils stockent, sous haute surveillance, les milliers de choses qu’ils chinent au hasard des salles de vente, des antiquaires, des voyages : meubles, art de la table, jouets, miroirs, œuvres d’artistes. Ils consultent les catalogues des designers, des éditeurs de textile, les nuanciers, parcourent les galeries d’art, les boutiques. Peu à peu la maison de leur rêve se dessine, prend forme, avec, mine de rien, un petit air californien qui va bien avec le Porto chic des bords de mer, une maison nichée derrière des murs blancs, avec dans chaque recoin, des surprises, des détails, même dans le garage, où Jacques, amoureux de belles carrosseries et de motos, abrite quelques-uns de ses trésors motorisés.

Résultat de ces extrapolations, de ces échanges avec nombre d’artisans avec lesquels ils ont l’habitude de travailler, une villa sans prétention, conviviale, facile à vivre. « Comme pour les projets que nous confient les particuliers, nous avons privilégié la rationalité, le confort, les beaux volumes et l’éclectisme. Et nous avons osé des sols en marbre blanc, des murs en cachemire et d’autres en raphia. Rien n’est plus ennuyeux que les styles convenus, les tendances qui se répètent, datent et vieillissent mal. »

UN SIMPSON À LA PISCINE. Ci-dessus, piscine créée de toutes pièces. Accrochée, sous l’auvent, une figurine de Bart, personnage principal de la célèbre série Les Simpson, achetée lors d’une vente aux enchères. Chaise longue américaine Siesta, années 1960. Mobilier de jardin français, vintage, en métal, imitation bambou. Plantes Strelitzia nicolai.
UN TIGRE AU SALON. Page de gauche, le fauve, embaumé, garde l’entrée devant un fusain de Robert Longo et un panneau sur acier d’Aaron Young. Sur l’autre mur, photos d’Helena Almeida. Pièce remarquable, console Pipe Show d’Hervé van der Straeten, lampe en verre vert de Fontana Arte. Table basse en bronze Philip & Kelvin Laverne. Tabouret capsule Hervé van der Straeten.

UN BONBON DANS LE DINING ROOM. Sol et table en marbre blanc portugais Estremoz, dessinés par Oitoemponto. Plafond et rideaux cachemire Loro Piana. Chaises Gustav Siegel, Autriche 1890. Vase Angelo Mangiarotti, lustre en cristal de Venise d’André Arbus pour Veronese. Bonbon rouge Laurence Jenkell, tableau Leonel Moura.
UNE CHAUSSURE AU MUR… côté salon, mais encadrée et bel et bien signée Andy Warhol. Cette œuvre cohabite avec un dessin de Jean Cocteau. Canapé Isa par Gio Ponti, table basse Cityscape de Paul Evans, guéridon Épines d’Hervé van der Straeten, lampadaire Svenskt Tenn, chaises Lina Bobardi.
UN ROI AU BUREAU. Aménagé dans l’entrée, espace bureau avec bibliothèque réalisée sur mesure. Sol en marbre blanc, bureau en cuir Jacques Adnet, fauteuil XVIIIe siècle de style Louis XVI signé du menuisier-ébéniste lyonnais, Pierre Nogaret, lampe Épines d’Hervé van der Straeten, chaise Lola Mundo de Philippe Starck.
UN FANTÔME SUR LE PALIER. À partir d’une plateforme habillée de boiseries en iroko, bois exotique résistant et facile d’entretien, quelques marches en marbre desservent la salle à manger légèrement en contrebas de l’entrée et de la cuisine. Sophie, sculpture fantomatique de Xavier Veilhan, photo visage, Cindy Sherman.
UN BARRACUDA DANS LE COULOIR. Le corridor desservant les chambres pour préserver l’intimité, joue les galeries d’art. Tapis tissé main de Federica Tondato. Étagère en bois et bronze d’Osvaldo Borsani & Arnaldo Pomodoro. Deux photographies cibachrome (en couleurs) de Vanessa Beecroft. Au fond, Barracuda, composition murale d’Arman.
UN LOUP EN CUISINE Artur et Jacques ont voulu une cuisine quasi professionnelle. Réfrigérateurs Sub Zero, autres appareils ménagers, cuisinière comprise, Wolf. Éléments sur mesure en noyer vernis, comptoirs en inox brossé, chaises américaines années 1960, suspensions en verre églomisé à la feuille d’or Urban Electric.
UN PHARAON EN CHAMBRE. Réservée aux amis avec en pièce maîtresse un fauteuil néoégyptien vintage (années 1950) inspiré de celui de la tombe de Toutânkhamon. Murs tapissés de raphia naturel. Rideaux Ralph Lauren. Lit Osvaldo Borsani & Arnaldo Pomodoro. Lampes de chevet Urban Electric. Tableau miroir graffité de Stefan Brüggemann.
UN COUPLE DANS LE BAIN. Artur et Jacques ont dessiné et imaginé, ensemble, la salle de bains de leur master bedroom. Ils ont choisi des matériaux nobles : le marbre de Calacatta et le palissandre, bois très veiné et précieux. Chaise et appliques en bronze de Mark Brazier-Jones.

Artur Miranda et Jacques Bec d’Oitoemponto, architectes, décorateurs.


Ils ont fondé en 1993 à Porto, Oitoemponto, maison d’architecture, de décoration d’intérieur, de design. Oitoemponto signifie huit heures pile, et résume bien la philosophie, le concept d’Artur et Jacques pour la décoration d’un palace urbain, d’un resort 5-étoiles, d’une résidence particulière. Ils aiment la précision, le symbolisme de la boule 8 du billard, numéro de la chance et du signe infini chinois. Plus qu’un style, ils déclinent une grammaire transversale allant du xviie siècle, au Mid-Century, mouvement architectural fort des années 1950-60. La phrase qui résume leur intention : « Quand James Bond rencontre Joan Crawford sur la Lune ».

Article paru dans le numéro 183 de RD – Résidences Décoration.

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