Kartell, le design révolutionnaire en héritage

Véritable symbole du design made in Italy, Kartell est connue pour ses chaises transparentes, son utilisation unique du plastique et ses collaborations avec les plus grands designers. Ce que l’on sait moins, c’est que Kartell est surtout et avant tout une aventure familiale qui s’écrit dans la région de Milan depuis plus de 75 ans.

Texte Anne-Louise Sevaux

La culture du plastique  

Lorsqu’il fonde Kartell en 1949, Giulio Castelli a une intuition : le plastique sera le matériau de demain dans nos intérieurs. Ingénieur chimiste de formation, il a été l’élève du futur Prix Nobel de chimie Giulio Natta, récompensé en 1963 pour ses travaux sur les polymères. Giulio Castelli commence par produire « de petits objets, comme un presse-orange, raconte Lorenza Luti, petite-fille du créateur. Mais avec déjà un grand sens du design ». Puis vient le temps des meubles et des luminaires, avec le plastique et l’esthétique comme fils conducteurs.

Dès les débuts de l’aventure, il est accompagné de sa femme, Anna Castelli Ferrieri : « Elle était l’une des premières femmes architectes urbanistes de Milan. » Elle est notamment la créatrice du petit meuble de rangement Componibili, best-seller de la maison. « C’est aussi elle qui a conçu, aux côtés d’Ignazio Gardella, l’usine et le siège de Kartell, dans lesquels nous sommes toujours installés aujourd’hui », raconte, non sans fierté, Lorenza Luti. Dans ce bâtiment rouge, aux portes de Milan, l’usine originelle a été remplacée par un grand musée Kartell. Un lieu chargé d’histoire et d’anecdotes, qui continue, plus que jamais, de bouillonner et d’innover, et toujours en famille.

Anna Castelli Ferrieri, épouse de Giulio Castelli, fondateur de Kartell, était l’une des premières femmes architectes urbanistes de Milan. Également designer, elle est notamment la créatrice du meuble de rangement Componibili. © DR

Une histoire de famille  

En 1988, Claudio Luti, le gendre des fondateurs, rachète Kartell à ses beaux-parents. Après avoir longtemps travaillé dans la mode aux côtés de Gianni Versace, il insuffle un nouveau souffle à l’entreprise, la portant vers plus d’ambition, de précision et d’innovation.

Aujourd’hui, Claudio Luti travaille aux côtés de ses deux enfants, Lorenza et Federico, pour construire, toujours en famille, l’avenir de Kartell. © iovanni gastel

Claudio Luti s’entoure alors de créateurs de renom pour créer des projets uniques à quatre mains. Ils sont une petite dizaine à rejoindre ce qui deviendra la grande famille Kartell :
Ludovica Serafini et Roberto Palomba, Piero Lissoni, Patricia Urquiola, Fabio Novembre, Tokujin Yoshioka, Ferruccio Laviani, le directeur artistique de la maison et bien sûr Philippe Starck, une rencontre déterminante. « Il a véritablement changé l’esthétique de Kartell », assure Lorenza Luti, qui travaille toujours avec le designer français aujourd’hui.

La place accordée aux designers a toujours été primordiale pour l’entreprise milanaise, et Lorenza l’assure, « Kartell n’a pas un style propre, ce sont les designers qui donnent le style. De notre côté, nous apportons notre savoir-faire dans la production industrielle. »

Depuis une vingtaine d’années, Lorenza et son frère Federico travaillent aux côtés de leur père et s’attachent à transmettre et poursuivre cette belle histoire.

La révolution transparente 

Parmi les chapitres marquants de cette histoire, il y a bien sûr la création de la première chaise totalement transparente, en 1999. « C’est une véritable révolution ! »,
insiste Lorenza Luti. Kartell devient alors la première entreprise au monde à utiliser le polycarbonate pour produire un meuble.

La première chaise transparente s’appelle La Marie, rapidement suivie par la Louis Ghost. Deux pièces signées Starck, deux best-sellers qui ont trouvé leur place dans tous les intérieurs, des plus classiques aux plus contemporains.

La chaise La Marie, imaginée en 1999 par Philippe Starck, est la première chaise au monde entièrement transparente, fabriquée en polycarbonate. © DR

Kartell ne cesse depuis d’explorer la transparence, poursuivant ses recherches de matériaux pour toujours plus de finesse, de robustesse et de souplesse. Récemment, l’entreprise a mis au point son polycarbonate 2.0, issu des déchets de cellulose et donc plus respectueux de l’environnement. Nouvelle prouesse. 

Le design industrialisé  

Pour réaliser ses pièces, en plastique ou pas, Kartell revendique un véritable savoir-faire industriel. Loin de l’artisanat, certes, mais avec la même exigence de qualité. « Les designers savent que Kartell propose des produits industriels. Nous devons pouvoir les mouler et les répliquer, en conservant une qualité irréprochable », explique Lorenza Luti.

D’abord imaginée en métal par son designer Ron Arad, la bibliothèque Bookworm a finalement vu le jour en PVC en 1994. Un produit révolutionnaire, surprenant par sa forme, sa flexibilité et sa résistance. © DR

Cette production à grande échelle permet à Kartell de proposer des prix corrects et ainsi « de donner accès à des pièces de design signées au plus grand nombre ».

Aujourd’hui, Kartell compte une dizaine de sites de production, répartis dans le nord de l’Italie : « Tout est fait dans la région, et nous y tenons beaucoup. » Car l’Italie, et notamment Milan, occupe l’un des premiers rôles de cette saga familiale.

Design, fonctionnels et pratiques, les meubles de rangement Componibili, créés par Anna Castelli Ferrieri en 1967, restent aujourd’hui encore l’un des best-sellers de Kartell. © DR

Repères 

1949 : création de la société Kartell par Giulio Castelli.

1988 : Claudio Luti, gendre de Giulio et Anna Castelli, rachète l’entreprise. 

1999 : Kartell devient la première entreprise au monde à utiliser le polycarbonate pour produire des articles d’ameublement et crée une chaise totalement transparente, La Marie, qui sera suivie de la Louis Ghost.

1999 : ouverture du musée Kartell dans l’usine historique, à Noviglio.

2003 : arrivée de Lorenza Luti, son frère Federico Lutti rejoindra l’entreprise familiale deux ans plus tard. 

2019 : manifeste « Kartell loves the planet », pour l’engagement de Kartell en faveur de l’environnement.

Article paru dans le numéro 181 de RD – Résidences Décoration.

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