En trois mois, aucune critique négative, aucun tacle, dans un milieu à la dent dure pourtant. La « petite » cheffe montée de la Côte d’Azur enchante les palais. Le Guide rouge succombera-t-il à son tour à sa cuisine métissée ?
Texte Anne-Marie Cattelain-Le Dû / Photo Studio Pam
Presque un conte de fées si ce n’est que l’héroïne, loin de se languir en guettant le prince charmant, dirige une brigade. Et pas n’importe laquelle… celle d’Espadon, la table gastronomique de l’un des palaces les plus emblématiques du monde, le Ritz-Paris, place Vendôme. Poids plume, regard en mouvement perpétuel, mains d’intellectuelle, elle assume ses choix. Ceux d’une cuisine très personnelle, métissée de ses souvenirs africains et d’un art de la table à son image, que quelques objets soigneusement sélectionnés protègent d’un classicisme ennuyeux et rabâché. La scène se joue entre une salle claire où la cire et le stuc introduisent aux tables nappées de blanc légèrement brodé, et, aux beaux jours, le jardin se devinant au-delà des baies.
Ma Cuisine, mon concept
« Je suis née quelque part. Plus exactement en Afrique, au Gabon, où je m’envole bientôt pour quelques jours de repos. Ce pays de lumière, de mer, de terre et de forêt mêlées m’habite. Ses plats, reflets de sa culture, de sa diversité, parfumés, épicés avec mesure, où l’acidulé le dispute à l’amertume, se prêtent à la mixité, s’acoquinent sans façon avec les poissons des côtes atlantiques, les légumes tendres du grand potager de l’hôtel à Saint-Nom-La Bretèche, les volailles charnues d’Houdan. Je joue de cette complicité, jonglant entre l’huile de cacahuète quasi crémeuse, l’immortelle aux notes de curry, le gingembre excitant. François Perret, le chef pâtissier, participe à cette partition. »
Dîner du mardi au samedi. Pas de carte. Deux menus en 5 ou 8 séquences, 290 € et 380 €.
Ma recette : mes radis d’hiver couleurs du printemps
Pour 4 personnes – 15 min
2 radis red meat // 2 radis blue meat // 2 radis green meat // 2 radis noirs
Pour la vinaigrette : 5 cl d’huile de cacahuète (et non d’arachide) // 2 cl de jus de citron vert // Une pincée de fleur de sel // 2 tours de moulin de poivre de Timut // 2 g de poudre de cardamome verte // Une cuillère à soupe d’éclats de cacahuètes torréfiées.
Épluchez les radis. Taillez-en une moitié en billes, avec une mini cuillère à pomme parisienne. Avec une mandoline, tranchez finement l’autre moitié.
Superposez en carpaccio ces tranches sur un carré de feuille sulfurisée. Assaisonnez les billes de radis avec la vinaigrette et les éclats de cacahuètes.
Sur une assiette blanche, disposez les billes de radis. Recouvrez du carpaccio de radis. Avec un pinceau, déposez un voile d’huile de cacahuète. Juste avant de servir, saupoudrez quelques grains de fleur de sel.
Mon chemin de table
Flamme parfumée
Dans son écrin de porcelaine blanche rehaussé du soleil, un des emblèmes du Ritz-Paris, la bougie Grand Jardin inspirée des fragrances du patio de l’hôtel diffuse son odeur de feuilles vertes piquée de lys et de figue. 95 h de brûlage, 295 €
Flamme sous contrôle
L’hiver, il trône sous un extracteur dans la cuisine du Ritz ; l’été, dans le jardin. Barbecue compact, au charbon, facile à déplacer et à utiliser. 3 tailles. La plus petite, EGG MiniMax, idéale pour les particuliers, diamètre 33 cm, 35 kg. À partir de 1 250 €.
Retour de flamme
Un livre blanc, sans paroles, sans mots, mais une déclaration d’amour d’Eugénie à la littérature et à Marcel Proust, habitué du Ritz-Paris. La cheffe le dispose à droite des assiettes, aussi bien pour accueillir amuse-bouche, pain ou quelques immortelles. 169 €, existe ouvert.
Flamme intérieure
Belle idée, le granité anisé fenouil et absinthe, qui rappelle les écrivains consommateurs, comme Verlaine et Baudelaire, ce dernier, voisin du Ritz. Liaison entre le salé et le sucré, présenté dans un verre haut coiffé d’une cuillère à absinthe en métal argenté. Lot acheté chez Drouot.
Article paru dans le numéro 174 de Résidences Décoration.