Située sur les hauteurs de Ittre, dans le Brabant Wallon, cette maison s’intègre parfaitement dans le relief d’une colline. Ses espaces de vie longilignes s’étirent comme un seul trait, au coeur de la nature.
Texte Agnès Zamboni / Photos Laurent Brandajs
Dans un premier temps, les propriétaires, qui souhaitaient s’éloigner de Bruxelles pour s’installer à la campagne, avaient loué un logement pour conforter leur choix et prospecter tranquillement. Ils ont débusqué ce terrain, situé dans un lotissement des années 1960.
Avec la collaboration d’un premier architecte, ils ont imaginé une construction librement inspirée de la Cassidy House américaine. Les plans ont été refusés : les prescriptions drastiques de l’urbanisme imposaient une toiture à double pan en ardoise. « Nous avons repris le projet, en oubliant l’idée initiale d’une dualité des toitures plates, qui avait été rejetée. Nous avons inversé les contraintes et les fonctions classiques de l’aménagement d’intérieur, limitant les hauteurs sous plafond à 4,50 m, tout en évitant l’écueil des chambres sous les combles », raconte Bertrand Noël, de l’agence Open Architectes. Et l’audace de ce volume de 415 m2, dessiné avec maestria, a été récompensée par une nomination au grand prix d’architecture de Wallonie en 2019.
Au premier niveau, l’entrée, les chambres d’enfants, le bureau, la buanderie et les pièces annexes… sont légèrement enterrés, mais les grandes baies vitrées qui s’ouvrent sur la nature offrent un horizon sans vis-à-vis. Au second, une pièce à vivre de 93 m2 (16,1 m de longueur sur 5,8 m de largeur) se déploie, ponctuée par le volume hélicoïdal d’un escalier en tôle perforée permettant de relier les deux étages. Il ne possède pas de fût central, son garde-corps sert de support aux marches. Sa trémie circulaire, qui accentue la fluidité des lieux, émerge au niveau du parquet et permet une circulation plus aisée, de part et d’autre. Cet élément sculptural immaculé n’entrave pas l’organisation du séjour, où les fonctions essentielles sont marquées par l’emplacement des meubles. Le mobilier de la cuisine se prolonge dans la salle de sport qui jouxte la salle de bains et la chambre des parents. La décoration intérieure, chaleureuse, mêle influences scandinave et moderniste, pièces de design actuel et vintage.
Les ouvertures de la pièce à vivre offrent une perspective parfaitement dégagée, en surplomb des autres bâtisses. Et l’enclos ovale du lotissement, ponctué d’habitations desservies par des rues circulaires, disparaît. L’architecte Bertrand Noël a compensé l’absence de relation directe avec le jardin par la création de deux terrasses, l’une au sud et l’autre au nord, auxquelles on accède par un escalier.
La façade monochrome de 32,5 m de long décline un camaïeu de gris minéraux : gris ardoise de la toiture, gris anthracite du béton, gris clair de l’aluminium du garde-corps. Elle s’accorde avec les teintes dégradées de l’intérieur, où d’autres nuances de gris délicates cohabitent avec les tons doux du chêne clair. Le plafond du séjour profite de la volumétrie de la toiture à deux pans, qui a été parée de lattes de MDF plaqué chêne, choisi pour sa stabilité dimensionnelle. Ajouré, cet habillage qui recouvre un isolant acoustique et phonique semble faire écho au parquet en chêne semi-massif.
À l’extérieur, la toiture est magnifiée par son ampleur. Débordante, elle fait office d’ombrage, pour protéger la façade largement vitrée des rayons trop ardents du soleil et simplifier l’entretien des baies. Côté construction, le socle (et premier niveau) de l’habitation a été bâti en blocs de béton, tandis que la structure métallique du second, rythmée par des portiques gris anthracite tous les 4 mètres, a permis de dégager l’espace intérieur. « Une charpente bois aurait considérablement alourdi l’ensemble », précise Bertrand Noël.
Depuis leur emménagement, les propriétaires ont confié le terrain à un paysagiste. Ils ont également créé une piscine naturelle de 25 mètres de long dont la forme, façon couloir de nage, souligne la silhouette étirée de leur maison, qui a relevé le challenge de la modernité.
BERTRAND NOËL
Il a créé l’agence Open Architectes en 2006 avec Ruddy Picard, rencontré à l’occasion d’un concours. Aujourd’hui, l’atelier, situé à Ronquières, regroupe une équipe de 14 professionnels qui collaborent sur les projets en fonction de leurs compétences et savoir-faire respectifs. L’intérêt est de multiplier les interactions et de partager les points de vue pour proposer à chaque client la solution optimale, au terme d’une réflexion commune. Chaque projet, unique, est vécu comme une nouvelle aventure avec une approche architecturale qui se découpe en neuf étapes.
Reportage paru dans le numéro 166 de Résidences Décoration.