Monumentale et minimaliste, imaginée par Marc Corbiau pour abriter des œuvres d’art, cette maison de Bruxelles est un immense refuge contemporain conçu pour apprivoiser la lumière.
Soutenu par des colonnes, l’auvent de la terrasse est un des nombreux porte-à-faux qui caractérisent la maison.
Le nain rouge (White Snow Dwarf) de Paul McCarthy est l’épicentre du volume de réception. Dans le salon, canapé d’Antonio Citterio (B&B Italia), banc de George Nakashima, table basse d’Ado Chale en fonte d’aluminium, siège rouge d’Eero Saarinen (Knoll).
Dans la lignée des Victor Horta, Paul Hankar ou Henry Van de Velde, Marc Corbiau est depuis quatre décennies le spécialiste belge des grandes demeures d’avant-garde. Avec plus d’une centaine de chantiers à son actif dans son pays natal, et d’autres en Suisse, en Espagne, en Grèce, en Israël, il a l’habitude des clients fortunés et exigeants, ne détestant pas montrer leur statut social : « un peu à la manière des riches citoyens de l’Empire romain », sourit l’architecte, dont on connaît l’admiration pour le monde païen, qui dialoguait jadis avec les dieux et la nature.
« Une autre source d’inspiration me vient du minimalisme américain, né au début des années soixante-dix, poursuit le maître d’œuvre. L’ampleur et la générosité de ce mouvement, sa capacité d’amener le non-figuratif au-delà de la peinture abstraite européenne, m’ont toujours plu. J’aime mettre en valeur l’art contemporain, souvent de grand format, que je collectionne moi-même ». Ainsi, l’équilibre de l’Antiquité se mêle dans son travail à une géométrie très épurée, exaltant la beauté des volumes et des matériaux.
Telle est cette maison, une des dernières réalisations de Marc Corbiau, dans le quartier de l’Observatoire à Bruxelles, l’un des plus courus de la capitale belge, parsemé de résidences aux styles variés, au milieu d’une abondante végétation. « Côté rue, orienté à l’est, j’ai conçu, dit-il, un hall sur trois niveaux comme un véritable puits de lumière grâce aux baies vitrées des deux étages, le rez-de-chaussée étant fermé aux regards extérieurs par une façade en pierre de Meuse. L’après-midi, le soleil pénètre dans les pièces de réception, donnant sur le jardin planté d’un if géant ».
Le vestibule d’entrée, qui s’ouvre par une porte pivotante métallique, est un puit de lumière sans fenêtres éclairé par les baies des étages supérieurs. A gauche, une grande toile de Ruby Sterling, « SP62 2009 » (galerie Xavier Hufkens, Bruxelles). A droite de la porte, « Blade Runner » de Marilyn Minter. Le sol est en pierre de lave.
Le superbe enchevêtrement de luminaires des Bouroullec s’harmonise avec une oeuvre métallique rouge de Daniel Buren.
Signé par l’architecte d’intérieur Vincent Bruyninckx, le décor s’adapte parfaitement à l’esprit du lieu. Dans le salon, un canapé d’angle gris d’Antonio Citterio, des sièges rouges d’Eero Saarinen et une banquette « Craft Revival » de George Nakashima entourent une table basse d’Ado Chale, artiste belge des années 60-70 récemment redevenu très à la mode. Dans la salle à manger, un tableau de Gilbert & George surmonte une table faite d’un seul tronc d’arbre, près d’un mobilier en lattes de bois de Martin Eisler et Carlo Hauner. Au milieu, un nain rouge de Paul McCarthy marque le point central d’un cercle invisible où s’inscrivent les pièces de réception, vestibule, bibliothèque-télévision, salon et salle à manger.
Côté nord enfin, une vaste cuisine comble les vœux des propriétaires, très fins gourmets. Le premier étage abrite appartement privé, bureau, home-cinéma, bibliothèque et chambre d’amis. Le second est le domaine des enfants, disposant de deux chambres et de deux salles de bains. Un ascenseur à portes vitrées dessert tous ces niveaux, jusqu’au sous-sol avec piscine, fitness et hammam, lingerie-buanderie et garage pour cinq voitures. « Ainsi, malgré la superficie de la villa (près de mille mètres carrés), il est facile de s’y déplacer », conclut Marc Corbiau. Sens pratique, confort, transparence et lumière, telles sont les raisons de son succès auprès d’amateurs dont il a conquis la confiance et l’amitié.
Lavabo et baignoire en marbre blanc Bardiglio, robinetterie Vola, chaise africaine.
La tête du lit des propriétaires, en chêne teinté, sépare chambre et salle de bains. Lampes « Tolomeo » (Artemide), photo de Sugimoto.
Dans la salle à manger, tableau de Gilbert & George, table faite d’un tronc d’arbre et sièges blancs d’Eero Saarinen (Knoll). A droite, mobilier 1950 de Martin Eisler et Carlo Hauner (galerie Philippe Denys, Bruxelles), tableau d’Adam McEwen.
La maison domine une pelouse en pente douce, plantée d’un if géant. Sur la terrasse, transats en toile rouge des frères Giudici à Locarno (CH Design Furniture)et sièges « AA Butterfly », d’après l’original de 1938, dessiné par les Argentins Jorge Ferrari-Hardoy, Antonio Bonet et Juan Kurchan. Au rez-de-chaussée les pièces de réception, au premier étage le domaine des parents, et au second celui des enfants.
Texte par Philippe Seulliet – Photos Didier Delmas
Publié dans Résidences Décoration numéro 115